Archives de l’auteur : Adèle et Jay

COP20 – jour 3

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Le 3e jour nous avons rejoint le point de rendez-vous de la grande « marche mondiale de défense de la Terre-Mère ». Oxfam, WWF et les autres grandes organisations de solidarité internationale sont là. Greenpeace par contre est présent en nombre particulièrement ridicule. Peut-être le résultat de leurs actions coup de poing au Machu Picchu et aux lignes de Nazca quelques jours auparavant. Le héros de dessin animé de notre enfance Captain Planet est là aussi et se balade parmi les participants pour leur expliquer que ce n’est pas lui le héros mais nous ! Les syndicats sont présents en masse également. Nous attendons le départ en recevant plein de tracts (notamment certains un peu louches…) des mouvements indigènes, des ONG, des mouvements religieux présents… Le cortège se met finalement en route dans un désordre sans nom. Il semble que malgré la présence policière, rien n’ait été prévu par les autorités. Nous marchons donc sur les grands axes dans un joyeux bordel. De temps en temps nous devons courir pour rattraper le reste du cortège parce que la police veut rétablir la circulation. Des fanfares égaient l’ambiance. Nous commençons avec les ONG internationales pour remonter petit-à-petit vers les mouvements de gauche (on reçoit d’ailleurs le manifeste du Parti communiste péruvien). C’est la partie la plus impressionnante, les slogans fusent, les drapeaux volent en masse, le Ché et le candidat communiste sont mis à l’honneur. Patria Roja, le parti communiste péruvien lance ses chants de manif impressionnants. On croise aussi les mouvements indigènes et leurs grandes figurines. Le mieux est de le voir en image…

La foule arrive enfin sur l’une des places principales du centre de Lima. Les organisateurs de la Cumbre se succèdent pour prendre la parole et haranguer la foule tandis que les indigènes se lancent dans des cérémonies chamaniques qui en laisseront même certains dans un sale état…

Plus tard, nous accompagnerons les plus motivés partis manifester devant le Hilton où se sont réunis de grandes multinationales. Queremos agua, queremos maïs, las transnationales fuera del pais (Nous voulons de l’eau, nous voulons du maïs, et les multinationales hors de notre pays) ou encore El pueblo,unido, jamas sera vencido (le peuple, uni, ne sera jamais vaincu) sont hurlés face aux policiers qui gardent calmement l’hôtel de luxe.

Ainsi se finissent ces 3 jours pour nous. Il est temps de poursuivre notre voyage. Prochaine étape : Arequipa et le canyon de Colca (le second plus grand au monde).

Manif contre le changement climatique à Lima de Adèle et Jay que vous pouvez retrouver sur Vimeo.

COP 20 – jour 2

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Le deuxième jour, nous sommes allés découvrir la Cumbre de los pueblos frente al cambio climatico, ou le sommet des peuples contre le changement climatique. Ce sommet est organisé par les associations paysannes, étudiantes, syndicales et sociales du Pérou. On sent tout de suite que l’esprit de ce sommet est très fort lié à l’identité du pays dans lequel nous nous trouvons. Ce ne sont pas les organisations écologistes ou les mouvements de solidarité internationale qui sont les plus visibles mais les mouvements indigènes, paysans et syndicaux.
Ensuite, en ce qui concerne le contenu, on sent très vite que le message est plus large que le simple « combat vert ». Le slogan du sommet est d’ailleurs dans cette optique : changer le système, pas le climat, tout est dit. Ce qui explique le lendemain, nous verrons des slogans aussi variés que « stop au travail des enfants » ou « non à la violence policière ».

Nous nous rendons donc au Parc des Expositions de Lima où ont lieu de multiples événements pendant 4 jours.
Nous commençons par nous balader parmi les différents stands orientés sur l’activité paysanne péruvienne. Les mouvements indigènes sont bien représentés et se baladent fièrement en habits traditionnels dans le parc. Plusieurs chapiteaux sont consacrés à des débats et des présentations. Nous assistons ainsi à une présentation par un expert du GIEC (le groupe d’experts international sur le changement climatique qui fait autorité en la matière) qui nous explique l’enjeu du réchauffement climatique. Aujourd’hui, nous en sommes à 0,8° d’augmentation et les prévisions actuelles annoncent une augmentation de plus de 2°. Il est évident, nous explique-t-il que la température change tout le temps, ne fut-ce que durant une journée, mais ici, nous parlons d’une augmentation mondiale. On devrait rester en dessous des 2° d’augmentation pour limiter les impacts négatifs tels que le typhon qui sévit en ce moment en Indonésie. Mais pour cela, il faudrait que l’ensemble des pays mènent des politiques qui permettraient de limiter l’émission de gaz à effet de serre pour arriver à 0 en 2050, ce qui impliquerait de s’y mettre dans les 5 ans.
Nous assistons aussi à une présentation de ce qui se passe actuellement dans l’autre sommet, celui des gouvernements. L’organisation « Global campaign to demand climate justice », très bien informée nous livre quelques infos intéressantes. Les Européens ne parviennent toujours pas à parler d’une voix et restent bloqués sur leur idée de « marché d’émissions » (en gros celui qui pollue moins permet à d’autres de polluer plus). On apprend aussi que les Australiens et les Canadiens jouent un rôle de plus en plus négatif sur les négociations, en lançant notamment des rumeurs accablant les Chinois. Un papier non officiel est pour le moment en discussion mais n’aborde pas les questions principales. On sent l’inquiétude qui plane sur les négociations. On entend même certaines associations parler de rejeter le texte et de quitter complètement la conférence. A suivre donc.
Une autre association nous explique que pendant que le peuple et les gouvernements se rassemblent, les grosses multinationales tiennent elles aussi un sommet au Hilton de Lima. Une action pacifique est donc prévue le lendemain.

On se balade encore un peu et on finit par acquérir nos fameuses accréditations : nous voilà donc officiellement participants de la Cumbre. Ce rassemblement nous permet aussi d’observer les populations indigènes mais aussi les inratables alters et youkous qui sont évidemment de la partie. On voit aussi une distribution de nourriture et… surprise, de jus de fruit Coca-Cola… L’incohérence nous fait sourire. Les grosses entreprises sont évidemment très présentes lors des sommets climatiques. C’est l’occasion pour elles de changer leur logo en vert ou de financer une expo photo. On est en plein dans le Greenwashing…

Rendez-vous est donné pour la manif du lendemain ! On a hâte d’y être !

COP 20 – jour 1

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Bon, on va l’avouer, c’est complètement par hasard que nous nous sommes retrouvés à Lima au moment de la conférence de l’ONU sur les changements climatiques. Mais comme vous le savez, c’est l’un de nos dadas…

Il y a quelques années en effet, nous avions pris la route pour la Pologne avec une assoc et quelques-uns de nos potes étudiants pour participer aux mobilisations citoyennes qui entourent ce genre d’événements. Nous avions même eu la chance d’obtenir un statut d’observateur (pas évident) pour pénétrer dans les enceintes de la conférence et observer de l’intérieur. Une expérience de fou ! Nous étions partis l’année suivante pour Copenhague dans un train partant de Bruxelles (30h!). Et là, d’un coup, nous nous rendons compte que nous serons à Lima durant le sommet de cette année ! Quelques petits arrangements de programmes et nous voilà parés pour la COP20 de Lima.

COP-quoi ?

En très gros, la COP (=conférence des parties) est le sommet annuel qui regroupe les chefs d’Etat et de gouvernement qui ont accepté de discuter sur les changements climatiques. Le cadre de l’ONU pour ces discussions s’appelle UNFCCC.

Pour résumer, les scientifiques puis les représentants politiques ont commencé à prendre conscience de la réalité du changement climatique d’origine humaine dans les années 90. Le sommet le plus connu est Kyoto où une série de pays s’accordaient pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les accords de Kyoto ont néanmoins des limites (notamment le fait que tous les pays ne sont pas impliqués) et on est entré dans un nouvelle phase de négociations. Les pays prennent de plus en plus conscience de l’urgence et on parle depuis 2011 d’un accord de réduction des émissions de gaz à effet de serre impliquant tous les pays du cadre onusien. Cet accord doit être adopté l’année prochaine à Paris. C’est ce qui se joue ces jours-ci à Lima.

Les gros enjeux

En bref, les pays doivent notamment s’accorder sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, sur un mécanisme financier et de transfert technologique qui permettra aux pays en développement d’amorcer une transition et enfin la contribution de chaque pays à ces accords.

Et nous, on va papoter avec Obama ?

Comme lors des précédents sommets où nous avons été, un sommet est organisé en parallèle par la société civile. Les organisations paysannes, syndicales et étudiantes péruviennes ont en effet organisé un sommet des peuples contre le changement climatique. C’est plutôt là qu’est notre place ;-)

Jour 1

Le sommet a commencé depuis quelques jours et voit se balader beaucoup d’internationaux dans la ville. On les reconnait au badge qui pend à leur cou. Soit ils sont fuchsia et ils font partie des délégations des pays qui négocient, soit ils sont orange et ils sont observateurs. Au retour d’une balade jusqu’à la mer, nous croisons un groupe d’Africains qui arborent fièrement leur badge et nous saluent en Français. Nous sautons sur l’occasion et nous entamons la discussion. Nous sommes tombés sur la délégation officielle de Guinée (dont la plus haute représentante) et nous leur demandons comment cela se déroule à l’intérieur. Ils nous répondent que les choses sérieuses commencent maintenant que les ministres sont arrivés et que la pression commence à monter. On sent dans leur ton que la pression de 2015 est là. Ils nous expliquent aussi que pour leur pays ainsi que pour les autres pays africains, l’idée d’un mécanisme de compensation est incontournable. Nous les laissons terminer leur shopping et nous finissons de nous organiser pour pouvoir prendre part aux deux jours qui vont suivre !

Impressions brésiliennes

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Quand on quitte un pays, on a souvent envie de se retourner et de prendre un peu de temps pour penser à ce qu’on a vécu. Envie de penser à ceux qu’on a rencontrés, aux discussions qu’on a eues avec eux. De se rappeler ce qu’on a goûté, les bonnes comme les moins bonnes surprises, de ce qu’on a senti aussi parce que c’est l’un des sens qui est le plus secoué quand on voyage. Envie de se repasser toutes les photos mentales qu’on a prises, les endroits magiques qu’on a vus, les moments de fous qu’on a vécus.

On a aussi envie de faire ressortir une impression de tout cela. Elle vaut ce qu’elle vaut. Elle n’est basée sur aucune méthode scientifique. Mais on a quand même vécu quelque chose et même si ce n’est pas généralisable, on a envie d’écrire nos ressentis.

Le Brésil…

Un pays fait de bruit. Babylon Circus décrivait un quartier chaleureux fait de « musique et de bruit ». C’est un peu l’impression qu’on a quand on se remémore nos 30 jours au Brésil. Les Brésiliens que nous avons croisé chantent ou fredonnent très souvent. Et quand ils ne chantent pas, ils battent la mesure ou jouent des percussions sur un bureau, la coque d’un bateau ou une chaise. L’amour des Brésiliens pour la musique et le rythme transparait à chaque coin de rue, file d’attente ou trajet de bus. Cela donne une ambiance bruyamment géniale ! Quand l’un écoute sa musique dans un minibus, tout le monde peut en profiter. Et quand son voisin a envie d’écouter la sienne, tout le monde peut comparer laquelle il préfère. Ce qui est frappant pour nos oreilles européennes, c’est que personne ne bronche comme nous le ferions en Europe. Cela fait partie de la culture. Le moment le plus marquant pour cela est un arrêt de notre trajet Belém-Manaus en bateau-hamac. Vu que nous étions proche d’une ville, les occupants du bateau avaient allumé la télévision pour regarder des émissions de futbol. D’autres (vachement imbibés) préféraient écouter de la musique très fort. Ceux qui chargeaient le bateau en nouvelles marchandises s’y sont mises aussi avec leur propre musique. Le moteur du bateau ne s’était bien sûr pas arrêté. Cela donnait une énorme cacophonie assez représentative de notre mois au Brésil.

On dit aussi que le Brésil est un pays violent. On l’a beaucoup entendu, les voyageurs en parlent souvent et les Brésiliens ne sont pas en reste. Il faut dire qu’à chaque fois qu’on a tourné les yeux vers une télévision, quand ce n’était pas du foot, c’était un reportage sur un meurtre ou un braquage sanglant dans telle ou telle ville du Brésil. En quittant Belém, nous avons même appris qu’un policière s’était fait assassiner et qu’en représailles 20 narcotrafiquants avaient été tués. Sur le bateau, on nous a raconté des histoires de pirates abordant les bateaux et pillant ses occupants. Nous avons donc été très prudents. Peut-être trop diront certains.
Heureusement, nous n’avons fait que de bonnes rencontres. Et c’est un vrai contraste : entre le sentiment d’appel à la prudence qui reste en nous et la chaleur, l’amabilité, la générosité des gens que nous avons rencontrés. De Carlos, notre pote du bateau-hamac, à la personne qui se trouve dans le même bus bondé que nous et qui nous adresse un sourire plein de complicité, en passant par le monsieur qui nous voyant chercher sur notre plan est venu nous aider, nous avons été charmé par les Brésiliens.

Le Brésil est un pays énorme. Tout y est grand. Et tout y est vécu en grand. C’est donc un pays qui a plongé la tête la première dans la consommation de masse. Et ça se voit. Dans la rue, on peut comprendre les statistiques qui placent la moitié de la population en surcharge pondérale. Les Brésiliens que nous avons vus, boivent des sodas et de la bière en masse et grignotent à toute heure. Leur gastronomie est également très riche. Même quand ils cuisinent des classiques internationaux. Ne tentez pas une pizza par personne au Brésil. Vous ne finirez pas. On nous a aussi expliqué qu’il était dangereux pour son portefeuille de tenter de suivre des Brésiliens qui font la fête. La consommation de masse est toujours intimement liée à l’apparence…

Le Brésil est définitivement un grand pays. Des distances titanesques pour aller d’un point à un autre. Trois fuseaux horaires. Sur nos montres, les aiguilles avancent toujours à la même vitesse qu’en Belgique et pourtant, le temps prend un tout autre sens ici. En Amazonie, le temps semble s’écouler comme le fleuve et la forêt en ont décidé. Un rythme lent et tranquille. Dans la rue, tout le monde prend son temps. Nos pas pressés d’Européens ont du mal à s’y adapter et s’impatientent. Dans les magasins, les Brésiliens patientent sagement que le caissier scanne les articles et les range dans un sac, tout en regardant à droite et à gauche, le geste lent, comme s’il se trouvait dans son hamac après une sieste. En Amazonie, pour se déplacer, à part l’avion qui est très cher, pas de routes, seuls les bateaux permettent d’aller d’un point à un autre. Les distances étant énormes, on compte en heures – voire souvent en jours – le temps de trajet. Cela nous semble inimaginable pour nous Européens. Nos repères sont tellement différents : Londres est à 2h de Bruxelles en train, Paris à quelques 3 heures de route et New-York, de l’autre côté de l’océan, à seulement 8h de vol. Les habitants de la région perçoivent le temps autrement et retrouvent leur famille ou leur travail après plusieurs journées de traversée, c’est normal. Prendre le temps, c’est prendre conscience des distances, de la grandeur du monde autour de nous. Prendre le temps, c’est finalement se laisser surprendre par ce qui nous entoure et ne pas faire des trajets un temps intermédiaire insignifiant.

Le Brésil est ce que la nature en a fait. Le Brésil est le poumon de notre planète, qui n’a jamais entendu cela à l’école ? Quand on décrit l’Amazonie, on parle de cette forêt bordée par ses nombreux rio et son fleuve. C’est cette nature qui a forgé le mode de vie de ses habitants et non l’inverse. Ici, on sent que la nature s’impose à nous, elle dégage une telle force qu’il est impossible de ne pas se sentir tout petit et intimidé. D’ailleurs, sans connaissances, on se ferait vite piégé dans cet enfer vert. Mais quand on y regarde de plus près on se rend compte de toutes les richesses qu’elle offre : plantes médicinales, arbre « à eau potable », biodiversité qui recèle encore bien des mystères pour les scientifiques, véritable ogre à CO2… Les seuls à véritablement la connaître et à s’y sentir comme à la maison sont ses habitants indiens ou ceux qui y sont nés. Et ces derniers nous ont impressionné pour leur culture respectueuse de l’environnement, en harmonie avec cette nature mystérieuse. « Not hear it but listen it. Not see it but look at it – ne pas l’entendre mais l’écouter. Ne pas la voir mais la regarder ».

Au Temple du Soleil sur les traces de Tintin

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Notre étonnement lorsque nous avons quitté la ville pour aller voir le site inca de Pachacama. Autour de nous, un décor désolé et poussiéreux. Des petits villages éparpillés dans le paysage apportant quelques touches de couleur aux collines de sable et de poussière. On se rend alors réellement compte comme la ville de Lima a été construite dans un désert et que les parcs et fontaines qui embellissent la métropole ne sont que le fruit d’un aménagement et entretien conséquent.

Pour en revenir au site de Pachacamac, tout belge qui est/a été accro aux aventures du célèbre reporter Tintin se souvient du cargo « Pachacamac » et de son enquête au Pérou. Dans cet album, Hergé s’est inspiré de l’histoire d’une cité inca qui se trouve ici près de Lima. Cette cité administrative et cérémonielle a été utilisée et agrandie par différentes civilisations. Pachacamac signifie « Celui qui créa la terre et le temps » et est l’un des dieux honorés sur ce site. Les Incas en firent une ville majeure, dominée par le Temple du Soleil. On avoue, on a espéré y retrouver une bouteille de whisky du Capitaine Haddock mais sans succès… Lieu sacré oblige !

Le site s’étend sur un désert infini avec une vue sur la côte. Il nous a fallu plus de deux heures pour le parcourir à pied (bien sûr à midi sans crème solaire, il faut croire que certaines habitudes familiales persistent… cfr famille Guillaume). Aujourd’hui il ne reste que des murs éparpillés et des chemins restaurés mais on peut vraiment se projeter quelques siècles en arrière. De nombreuses dépouilles humaines bien conservées y ont été trouvées en 2012* projetant le site sous les projecteurs et mettant en lumière le manque de fonds alloué pour sa protection et réparation. Actuellement, Pachacamac se trouve sur la liste des sites archéologiques les plus menacés de la planète.

* On peut d’ailleurs être fier car c’est l’ULB qui a mis à jour une chambre funéraire où se trouvaient plus de 80 squelettes et momies recouverts d’offrandes. D’après les archéologues, il s’agirait de pélerins malades venus se faire soigner dans ce sanctuaire sacré. Malheureusement, cela ne semble pas leur avoir réussi…

Lima, la cité des rois

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Les hauts gratte-ciels sans charme et la carte de la ville à l’échelle 2 km ne motivent que peu de touristes à planifier un séjour dans la métropole péruvienne. Cette capitale de près de 9 millions d’habitants s’accroche aux falaises côtières. Le fracas des vagues du Pacifique se mêle au bruit des klaxons d’un nombre – trop – important de voitures.

Une particularité de la ville est que dès le mois d’avril et durant tout l’hiver péruvien, un brouillard l’enveloppe toute entière. Cette brume donne au ciel une couleur blanchâtre, cache l’horizon et donne à la ville une véritable atmosphère mélancolique. Une citation célèbre parle même de Lima comme de « la triste cité ». Francisco Pizarro, le conquérant espagnol installa le centre de son empire andin ici même afin de bénéficier de l’accès à la mer. Ses bateaux partaient de Lima pour rapporter en Europe les richesses pillées – on peut le dire – au Pérou. C’est en plein été, un 18 janvier qu’il fonda Lima, sous un ciel bleu azur. Il ne s’attendait probablement pas à ce qu’une telle brume enveloppe sa cité des Rois. Tout comme nous qui avons découvert cette cité dynamique et verdoyante sous un soleil radieux.

Nous nous sommes installés pour une petite semaine dans le quartier de Miraflores – que nous aimions traduire par Regarde les fleurs. Dans ce quartier, on ne trouve pas de vestiges coloniaux, c’est plutôt moderne mais il se prête plutôt bien aux siestes dans le parc, aux rencontres, à la dégustation d’un pisco et d’un ceviche sur une terrasse et aux balades jusqu’à la mer. Chaque midi, nous allions pique-niquer dans le parc Kennedy. Les chats ronronnaient de plaisir sous les doux rayons de soleil. Ici, des dizaines de chats y étaient comme à la maison. Peu de pluie, des températures clémentes mais surtout, des habitants attentionnés. Nous n’avions jamais vu cela ! Une telle attention pour des chats «  de gouttière ». Un vieux monsieur venait tous les jours leur apporter à manger, les passants leur offraient des caresses, les amoureux enlacés les laissaient venir se lover près d’eux…

En fin de journée, nous aimions marcher jusqu’à la plage, comme les jeunes après leurs cours. Nous écoutions le bruit de l’eau dans les galets et observions les surfeurs jouer avec les vagues glacées du Pacifique. A quelques mètres de nous, un sapin de Noël avec des boules en forme d’étoiles de neige… Y’a rien à faire c’est quand même perturbant dans un tel décor!

A 30 minutes en bus-métro (métro mais en forme de bus :-) ) collé-serré avec les liméniens, on arrive au centre historique de Lima. On y trouve la plupart des bâtiments coloniaux mais ces derniers sont peu nombreux. La capitale a connu des temps difficiles. Fondée par « mister Pizarro » en 1535 lors de l’Epiphanie – d’où son nom « cité des Rois » – la ville a connu un essor important à cette époque-là, mais un tremblement de terre a détruit la plupart des édifices deux siècles plus tard.

Un autre coup dur pour la métropole fut la guerre du Pacifique où, affaiblie, elle ne résista pas longtemps à l’attaque de l’armée chilienne, revendiquant ce territoire. Elle fut saccagée et on lui déroba de nombreuses richesses. Sans oublier le terrible tremblement de terre de 1940, l’exode urbain massif qui défièrent la ville ce dernier siècle. Mais toujours Lima renaîtra et aujourd’hui la ville fait peau neuve avec ses avenues goudronnées, ses parcs fleuris et ses scènes culturelle et culinaire impressionnantes.

Au coeur de la ville, la Plaza de Armas ou Plaza Mayor. Peu de bâtiments d’origine mais un bel ensemble orangé aux côtés du palais présidentiel et de la gigantesque cathédrale. Si vous vous dirigez vers le sud, par la rue piétonne et commerciale Jiron de la Union, vous arriverez à la Plaza Martin où il fait bon s’asseoir dans l’herbe et observer les familles déguster une glace ou une gellatina. Si vous vous dirigez vers l’est, le grand marché et le quartier chinois – oui oui – où l’on ne vend que crèches et guirlandes en cette période de fêtes.

A midi, sur la Plaza de Armas, il y a la relève de la garde. Les soldats effectuent un traditionnel « pas de l’oie » au son des cuivres. La foule de touristes et de liméniens courent après eux pour assister au spectacle.

Au même endroit, un soir, nous avons assisté à un rassemblement religieux en l’hommage de la Vierge. Nous avons ensuite compris que c’était la fête de l’Immaculée Conception. Un concert et une grande messe en plein air y étaient organisés. Une foule impressionnante s’est rassemblée pour chanter, danser, prier, un cierge à la main. Nous avons assisté à l’événement avec grand intérêt. Dans la foule, des jeunes, des vieux, des couples, des familles… chantant en choeur « Yo te amo » « Jésus, je fais un pas devant, un pas derrière, pour toi ». Une belle immersion interculturelle pour nous qui provenons d’un pays où la majorité des pratiquants dans les églises est, disons… vieillissante.

Mais nous n’étions pas à Lima uniquement pour faire du tourisme comme vous le constaterez dans les prochains articles…

En Amazonie péruvienne…

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Au Pérou le rio Amazonas continue sa course jusqu’à la ville d’Iquitos. Cette dernière est la plus grande ville fluviale au monde que l’on ne peut pas rejoindre par la route. Plusieurs jours de bateau la séparent des premiers kilomètres de goudron. Elle a été fondée il y a presque 300 ans par des missionnaires jésuites ayant besoin d’un refuge pour se protéger des indiens, hostiles à leurs idées de conversion. Aujourd’hui la ville a une place de choix dans l’économie du pays puisqu’elle permet de relier le Pérou à Manaus et à l’Atlantique – en quelques jours/semaines quand même.

Après une journée de bateau depuis la triple frontière, nous voilà donc au Pérou. Deuxième grande étape de notre projet. Quand on pense au Pérou, on imagine des collines verdoyantes, des troupeaux de lama, des marchés de tissus colorés… A Iquitos, rien encore de tout cela. De la terrasse du petit café où nous nous attablons, la vue est imprenable sur le fleuve paisible et la forêt. L’orage gronde au loin. Une armée de tuks tuks (petites moto-taxis) circulent dans les rues, en klaxonnant. Des familles flânent à l’ombre des palmiers en dégustant une glace et du pop corn rose/vert/jaune. Le sapin de Noël de la place principale est installé et scintille au soleil. Quand soudain, ce soleil disparait derrière de gros nuages gris et la pluie s’abat sur le fleuve et la ville. Tout le monde se met à courir et se réfugie sous les toits. Les écoliers sortant de classe courent le cartable sur la tête, leur uniforme trempé. Cette pluie ne nous quittera que très peu durant notre petit séjour à Iquitos, annonçant le début de la saison des pluies en Amazonie. Durant cette saison, il pleut à torrent et le fleuve peut monter de 10 à 15 mètres changeant totalement le paysage.

A l’extrémité de la ville, on trouve le bidonville de Belen. Un amas de maisons de fortune flottant sur les eaux du fleuve. En cette fin de saison sèche, la zone est à sec et les maisons sont posées dans la vase. De plus en plus de tours touristiques proposent une visite de familles des bidonvilles. Nous ne pénétrerons pas dans cet univers, par respect pour l’intimité de ces familles. En effet, nous gardons toujours en tête qu’il est important de ne pas confondre tourisme et voyeurisme. Au Brésil mais ici également, nous sentons l’écart béant qui existe entre les riches et les pauvres. Il y a peu de demi-mesure : soit l’on est très riche, soit très pauvre ! Des maisons fleuries et barricadées ont une vue sur des quartiers délabrés. Un constat qui ne nous laisse pas indifférents. Nous prenons le temps de découvrir le marché de Belen. Ici pas d’organisation en secteurs, on trouve de tout et de rien partout dans les allées : les poulets cotoient les poissons, les barquettes d’oeufs s’empilent près des mangues bien mûres. Une dame cuit de gros vers sur un petit grill pour en faire des brochettes à déguster sur le pouce – non non on n’a pas goûté beurk. Une petite mamy vend de grandes feuilles de bananiers utilisées dans la région comme assiettes ou pour cuire un aliment en papillote. Les enfants s’appliquent à éplucher les pommes pour les vendre en « take away ». On aura un p’tit pincement au coeur en voyant les étals de viande de tortues. Et tout cela dans un brouhaha assourdissant et un feu d’artifice de couleurs et d’odeurs. Nous ressortons de là tout étourdis, Jay un pepino (concombre) bien frais en mains et Adèle, l’estomac en compote à cause des bonnes odeurs de boyaux:-). Mais tellement contents d’avoir vécu ce premier marché péruvien le temps d’une matinée…

Quand nous voyageons nous avons toujours l’habitude et le plaisir de visiter les mercados – marchés, et les supermercados – supermarchés. Cela paraît peut-être bête mais ce sont deux lieux palpitants de vie et de foule tellement révélateurs de la culture et des habitudes de vie des habitants… On perçoit les habitudes alimentaires, mais on en apprend aussi sur la culture et la façon d’être en société. Ici au Pérou, on notera l’impressionnant rayon d’ « Inka Kola », soda jaune fluo goûtant le chewing gum, très apprécié !

On pourrait encore vous déballer mille détails sur nos découvertes ici, mais il est temps pour nous de quitter l’Amazonie et d’aller vers d’autres aventures…

Trois frontières

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Une frontière.

C’est une ligne. Un concept que nous avons étudié en Sciences Po. C’est un passage en voiture quand on est petit qui apporte une excitation toute enfantine. Passer d’un pays à un autre, ça fait toujours quelque chose. Notre génération d’Européens ne connait plus trop cette idée de frontière, ça donne une dimension supplémentaire un peu spéciale quand on voyage.

Nous sommes actuellement à un drôle d’endroit. Un point qui sépare 3 pays : le Brésil, la Colombie et le Pérou.

D’habitude quand on franchit une frontière, en tous cas dans les voyages que nous avons déjà faits, cela se passe en quelques étapes simples. On arrive à un poste frontière du pays qu’on quitte, on reçoit un cachet de sortie, un kiss et au revoir. On franchit alors la fameuse ligne, la frontière, et on arrive à un second poste frontière qui marque notre arrivée dans un pays. On reçoit le paquet habituel (cachet, kiss et bienvenue) avec plus ou moins de traçage de notre passage (empreintes digitales, photo, etc). Et puis c’est parti pour un nouveau pays.

Ici tout est un peu différent. La zone entre Tabatinga (Brésil), Leticia (Colombie) et Santa Rosa (Pérou) est une sorte de zone libre. Officiellement c’est un peu plus compliqué. Mais en pratique, si on est en règle dans un des 3 pays, on peut circuler dans ces 3 villes librement. Tabatinga et Leticia sont d’ailleurs collées l’un à l’autre.

Là où ça se complexifie, c’est au moment de passer de l’un à l’autre. Les 3 étapes (« aurevoir » – franchissement de la ligne – « bienvenue ») ne sont plus aussi simples. Il faut d’abord régler son dossier dans un pays et annoncer sa sortie, à la police fédérale brésilienne dans notre cas. A partir de ce moment, vous avez 24h pour vous dégoter le cachet d’un autre pays. Il ne faut donc pas annoncer sa sortie trop vite (comme nous l’avons fait), parce que la règle fondamentale de cette zone libre est de ne pas rester sans cachet (logique…).

C’est une drôle de vie pratique qu’on expérimente dans cette zone. On vous dit un prix vous le marchandez, logique. Mais qui vous dit que votre interlocuteur parle de la même devise que vous ? Ca donne des moments assez drôles ! Le passage d’une langue à l’autre est aussi très net. Mais pas toujours pour notre cerveau. Il faut du temps ;-).

Allez, c’est parti pour le Pérou !

3 frontières de Adèle et Jay sur Vimeo