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La grande muraille… électronique !

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Eh oui, bien avant de grimper la fameuse Grande Muraille, nous nous sommes attaqués à la grande muraille électronique comme on l’appelle ici. En fait c’est plutôt elle qui nous a attaqués mais bon…

Une Grande muraille électronique ? Eh oui ! La Chine a instauré début des années 2000 une barrière électronique autour de l’internet chinois, l’isolant du reste du monde. Officiellement, l’idée est de lutter contre ce qui pourrait nuire à la société chinoise, la pornographie par exemple. En réalité, ce système de censure de plus en plus restrictif sert à lutter contre tout ce qui pourrait nuire aux autorités : les blogueurs, les militants des droits de l’Homme mais aussi toute personne qui voudrait s’informer en consultant une autre source de presse ou d’information que les agences d’info autorisées. N’essayez pas de taper « Tibet » ou « massacre Tiananmen » dans Google. Déjà parce que Google et tous ses outils (gmail, maps, traduction, etc) est inaccessible en Chine ; mais même si vous essayez avec un autre moteur de recherche, la connexion sera bloquée. Évidemment, l’action du gouvernement n’est pas que politique : elle est aussi économique. Fermer son marché aux géants internationaux et permettre à des entreprises chinoises de se développer, c’est une stratégie qui peut rapporter gros, surtout avec un marché aussi important que la Chine.

Quand nous sommes arrivés en Chine, nous nous doutions que nous allions vivre une certaine déconnexion. Mais pas à ce point-là. Il nous a d’abord fallu nous défaire de nos réflexes : plus d’accès à nos boites mails, aux réseaux sociaux, plus d’accès aux sites d’infos (on les aurait bien consultés au moment de l’explosion chimique de Tianjin), plus de paiement en ligne (parfois très pratique pour ceux qui, comme nous, organisent en improvisant au fur et à mesure du voyage), et de manière générale un internet bloqué (ou super lent) pour un site sur 2.

Pour nous évidemment, cela change un peu le voyage. Cela complique certaines choses mais c’est aussi une expérience intéressante de se déconnecter à ce point. On prend conscience de notre addiction à tous ces outils et aussi de l’importance de tous ces réseaux d’information et de communication. On réalise vraiment à quel point nous sommes dans un réseau !

Mais ce que vit la population est tout autre. Nous n’avions jamais été dans un pays aussi isolé du monde extérieur… Et c’est impressionnant à vivre. Certains utilisent les subterfuges classiques (VPN, etc.) mais beaucoup ne sont juste au courant de rien de ce qui se passe dans le monde et dans leur propre pays (mis à part ce que le gouvernement sort comme information dans leurs communiqués).

Finalement s’attaquer à la vraie Grande Muraille est peut-être même plus facile que de s’attaquer sa version électronique !

Beijing !

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Beijing, ou Pékin (en français)… Une étape de notre trip que l’on avait hâte de découvrir. Nous avions prévu de lui consacrer une petite semaine… Cela nous paraissait déjà trop peu. Quelle surprise lorsque l’on a appris que le gouvernement chinois prévoyait d’y organiser une grande parade militaire pour la commémoration de la fin de la seconde guerre mondiale, et que la plupart des sites seraient fermés ces jours-là ! Pile au moment où nous serions sur place ! Nous avons simplement décidé de profiter de ce hasard pour découvrir la ville autrement, et faire l’impasse sur certaines visites touristiques…

Pékin représente le centre politique chinois depuis bien longtemps. De nombreuses dynasties installeront ici leur capitale, façonnant petit à petit la ville qu’elle est aujourd’hui. Malgré tout, la ville a considérablement changé ces dernières décennies… Afin de devenir une véritable vitrine du développement chinois et l’élève modèle de modernité, Pékin a subi de nombreuses transformations. Construction d’un périphérique de 130 km de long, forêt de buildings, centres commerciaux et métros modernes… On estime que Pékin connait actuellement autant de chantiers que l’Europe toute entière… Mais cette métamorphose a des conséquences, qui ne laissent pas indifférents : milliers de personnes expulsées et relogées dans des HLM tristounets, destruction du patrimoine historique, pollution à des niveaux extrêmement dangereux pour la santé des habitants… Sans parler des transformations de la ville pour accueillir les Jeux Olympiques de 2008. Aujourd’hui, le fameux Nid d’Oiseau brille encore au loin, dans la nuit pékinoise…

On nous avait dit : « il faut visiter Shanghai pour découvrir la Chine d’aujourd’hui, visiter Pékin pour découvrir 1000 ans d’histoire ». C’est en effet ce qu’on a fait ici à Pékin…

La place Tian’anmen, au centre de la ville. Nous avons observé ce lieu gigantesque où flotte le drapeau chinois, il y fait plutôt calme… Cela n’a pas toujours été le cas. C’est ici même que des étudiants manifesteront pacifiquement pour plus de démocratie en 1989 et seront massacrés pour leur action. Les derniers emprisonnés à l’époque ne sont sortis qu’en 2006. Vous connaissez tous cet événement, une photographie a fait le tour du monde : un jeune homme désarmé se tient face à une colonne de chars qui progresse sur la place Tian’anmen. C’est ici même aussi que Mao proclamera le début de la république populaire de Chine en 1949. Evénement historique qui influence encore énormément la Chine actuelle. La dictature chinoise, c’est ici. C’est ici qu’elle se matérialise et où elle veut marquer sa puissance.

A quelques pas de là, la Cité Interdite. Ancienne résidence de nombreux empereurs, elle s’impose au coeur de la ville par ses hauts remparts, ses couleurs chaudes et ses toits dorés. L’observer d’en haut est le plus impressionnant ! La porte du Midi, au sud de la Cité, comprend plusieurs portes principales : celle du centre était exclusivement réservée à l’empereur, ainsi que celle de l’est qui voyait partir son cercueil. A l’intérieur de cet immense ensemble de palais et de temples, on parcourt des petits ponts de marbre, des jardins aux arbres vieux de 500 ans, des temples, des salles pour les sceaux de l’empereur, pour les discours et réceptions, des palais pour les concubines et les appartements privés de l’empereur où les touristes chinois collent leurs joues sur les vitres pour apercevoir sa chambre à coucher.

Mais Pékin c’est aussi tellement d’autres choses !

La ville a malgré tout préservé quelques vieux hutongs, qui sont en fait des quartiers populaires flanqués de maisons anciennes. Quelle vie et quel bruit dans ce labyrinthe d’allées étroites ! A chaque fois que nous y avons été, soit nous nous sommes perdus, soit nous n’avons pas trouvé l’adresse que nous cherchions…

Accompagné de Bertrand, un ami belge étudiant ici, nous avons découvert le quartier de l’université, très animé et très métissé lorsque la nuit tombe. On y entend parler de nombreuses langues étrangères et on peut y déguster des bières de partout dans le monde (même de Belgique!). Rien de tel que de se poser à une terrasse dans la fraîcheur d’une soirée pékinoise, avec comme fond sonore les bruits de la rue et des klaxons.

Nous aurions bien parcouru les avenues et ruelles de Pékin encore une journée de plus, mais nous voulions absolument découvrir la Grande Muraille de Chine ! Certains tronçons de ce projet démesuré ne se trouvent qu’à 100 km de Pékin. C’est un passage obligé pour tout visiteur et on ne le regrettera pas ! La Grande Muraille a été construite pour protéger l’empire chinois. Elle ferait près de 7000 km de long ! Aujourd’hui, il n’est possible de visiter que certains tronçons, d’autres étant inaccessibles, endommagés ou non aménagés pour les visiteurs. Nous prendrons un bus pour aller visiter la partie « Mutianyu », plus éloignée mais moins courue que d’autres par les visiteurs. Nous ne serons pas déçus… A perte de vue, le mur serpente dans les collines sauvages. Il y a peu de touristes, il faut dire qu’ici les dénivelés sont importants et que cela peut en décourager certains ! Il faut parfois gravir des centaines de marches inégales et glissantes. Mais l’effort vaut clairement le coup. Plus on avance, plus la muraille se dévoile et s’étire à l’horizon. Nous marcherons avec notre ami Nicolas, rencontré dans le bus, jusqu’à des zones de moins en moins apprêtées pour les touristes, de plus en plus brutes et authentiques. Du haut de la colline, en voyant cet ouvrage perché au sommet des montagnes austères baignées de soleil, il est difficile de ne pas admirer un tel travail architectural symbolisant si bien la culture et l’histoire de la civilisation chinoise…

Une dernière Tsingtao, un dernier épisode « compressage » dans le métro, un dernier coup d’oeil sur cette ville surprenante, il est temps de partir…

Pingyao et ses petits toits courbés

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Lorsque l’on est sorti du TGV, on a été surpris… Après un mois de vadrouille en Chine, il nous a semblé que chaque ville concourait au concours de Mister plus haut gratte-ciel et Miss pollution… Pourtant ici, le ciel est bleu azur, l’air plus respirable, il y a moins de bruits, on marche dans un petit jardin pour atteindre le centre-ville protégé par de vieux remparts… Pingyao semble être une étape reposante avant d’atteindre Pékin, la trépidante.

Si la pureté de l’air ne sera malheureusement qu’une illusion – le lendemain il fera à nouveau brumeux à l’horizon – la vie dans le centre-ville historique nous fera un bien fou… Les voitures et tuk-tuks y sont interdits, il fait donc très calme… On avait presque oublié ce que c’était et à quel point ça fait du bien !

Nous passerons nos journées à flâner dans les ruelles et à observer les demeures traditionnelles bien conservées. Sur les axes principaux, sous de petits toits courbés, de belles façades aux peintures délavées abritent des petites boutiques à souvenirs et restaurants. Il faut bien satisfaire les nombreux touristes chinois ! Le souvenir le plus récurrent est une petite pince à cheveux agrémentée d’un trèfle ou d’un petit champignon… On en a acheté un aussi, le kitsh chinois ça ne se refuse pas !

Dès que l’on bifurque dans d’autres ruelles, on entre dans un labyrinthe de petites rues pavées et délabrées en plein coeur de la vie des habitants de Pingyao. Ici pas un touriste, juste des enfants qui crient un « hello » timide, du linge qui sèche au soleil et des ruelles sans issue. Notre hôtel se trouve dans ce type de petite ruelle. Dans la cour verdoyante, pas un bruit. Un chouette endroit pour bouquiner et boire le thé :-) !

C’est à Pingyao que fut lancée la première banque chinoise, la Rishengchang. Elle fit la réputation de la province durant longtemps. Cette banque fit faillite à la fin du XIXe siècle car elle refusa de suivre les marchés financiers chinois dans leur modernisation. On peut encore la visiter, ainsi que la maison de son fondateur, Lei Lutaï. Tous ces bâtiments authentiques sont intéressants à visiter, avec leurs architectures typiques et lampions aux toits, mais il faut le dire, ils sont un peu poussiéreux et la plupart des explications sont en chinois, nous avons dû louper certains détails… A Pingyao, il est aussi possible de se promener sur les remparts de la ville, la protégeant autrefois d’un éventuel envahisseur. Au loin, on peut voir la construction de nouveaux buildings pour accueillir l’arrivée en masse des chinois de la campagne… L’urbanisation est partout en Chine !

Nous avons également été nous balader dans les petits temples de la ville, aux arbres centenaires et aux fresques vieillies pleines de charme. Pour la première fois, nous avons visité un temple de Confucius. Ce dernier est un philosophe chinois, qui inspire encore de nombreuses personnes et penseurs. Il ne se réfère à aucun dieu, il est plutôt humaniste. Même s’il avait une vision conservatrice et misogyne, il parlait déjà de l’égalité des chances, par le mérite et non pas la naissance. Une énorme statue de ce dernier se dresse dans le temple. Aux arbres et aux rambardes de marbre, des centaines de morceaux de bois rouges volent dans le vent. Durant notre visite, un enfant chinois fait mine de vouloir sonner le gong… La dame de la sécurité s’empressera de l’en empêcher :-).

Si tous ces bâtiments et ces demeures sont encore debout, c’est uniquement car après la faillite de la banque, la ville tomba dans l’oubli et la pauvreté. Les gardes rouges n’y prêtent alors aucune attention durant la révolution culturelle, époque où de nombreuses vestiges anciens furent détruits…

Une halte reposante et agréable pour nous. Egalement, bien différente de ces grands centres urbains bruyants et de ces sites touristiques réaménagés et aseptisés pour les touristes.

Une nuit de train nous attend pour atteindre la capitale, Beijing. Beijing, la ville aux 22 millions d’habitants, aux 5 périphériques et aux 15 lignes de métro… Mais nous voilà d’attaque pour ce raz-de-marée !

Xian, le pays des raviolis et des soldats enterrés

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8h du matin. Beverly nous fait signe en descendant de sa couchette et nous dit « We have arrived ! » (Nous y sommes). Nous avons fait la connaissance de cette jeune ado chinoise la veille en embarquant dans notre train-couchette de Chengdu en direction de Xian. Nous avions choisi des tickets pas trop chers dans des compartiments de 6 couchettes dures. Tout contents de parvenir à acheter des tickets, nous n’avions pas remarqué que la gentille dame qui nous les avait vendus à Canton nous avait en réalité trouvé des couchettes séparées. Voyant notre surprise, la jeune chinoise insiste pour nous aider et s’arrange avec un monsieur qui acceptera de changer de place pour que nous ayons deux couchettes l’une à côté de l’autre. Nous nous installons en la remerciant. Nous discutons un peu et elle nous montre le programme qu’elle a préparé pour sa maman et elle. Très vite, les passagers s’installent et la lumière s’éteint. Franchement, nous nous attendions à pire avec ce train-couchette et, mis à part les ronflements et l’odeur de cigarette (eh oui, ils fument partout, même si c’est interdit), nous passons une bonne nuit !

Arrivés à la gare, notre nouvelle amie nous propose de l’accompagner en nous expliquant qu’elle a trouvé un couple de Chinois de Xian qui va les aider à rejoindre le centre. Nous les suivons et heureusement ! C’est un peu la course pour trouver le bus qui va dans le centre et une dame hurle des ordres aux passagers pour tenter d’organiser la place dans le bus. Nous et nos gros sacs finissons par trouver une place… Après le bus, c’est en métro qu’il faut poursuivre. Nous leur payons les tickets de métro pour les remercier de nous avoir payé les tickets de bus. Toujours difficile de savoir comment cela est perçu dans d’autres pays mais cela ne semble pas les choquer. Nous finissons par arriver à notre hôtel, sous l’escorte de notre jeune guide et de sa maman. La jeune ado nous quitte en nous faisant promettre de lui écrire. Après nous être installés dans notre chambre (le sous sol de l’hôtel est arrangé en rue traditionnelle et chaque chambre est une petite maisonnette), nous nous baladons un peu dans notre quartier qui est celui des artistes.

La grande attraction de Xian, c’est la fameuse armée enterrée. C’est l’histoire du premier empereur de Chine, Qin qui a décidé de conquérir les royaumes à côté du sien et qui a réussi à unifier ce territoire à grands coups de réformes politiques et culturelles et par des échanges massifs de population. Qin, prononcé Chine (c’est de là que vient le nom du pays), a dès le début de son règne commencé à faire construire son tombeau, comme la coutume le veut. Mais en plus d’un tombeau, l’empereur mégalo a décidé de passer sa vie dans l’au-delà avec une immense armée. Il a donc ordonné que soient construits 8000 soldats en formation de combat pour l’accompagner après sa mort. L’histoire ne s’est pas hyper bien terminée puisque ce chantier colossal a entrainé une grande famine et a plongé l’endroit dans l’oubli jusqu’à sa récente découverte.

L’endroit est très impressionnant. Nous avons commencé par la visite d’une salle montrant deux beaux chars extraits du sol. Bon les touristes chinois qui se poussent et se marchent dessus pour prendre une photo de près rendent la visite un peu fatigante mais ces deux énormes pièces de bronze donnent un premier aperçu de ce que nous allions voir. Vraiment impressionnant !

Ensuite, nous sommes entrés dans un immense hangar d’où l’on peut voir d’énormes fosses remplies de morceaux de soldats et de chevaux cassés. Certains sont encore en un morceau et on peut même avoir un aperçu de la manière dont ils étaient colorés à l’époque. A la vue de ces milliers de pièces, on ne peut s’empêcher d’imaginer l’énormité du travail accompli par ces artisans. Nous avons terminé la visite par le plus impressionnant : un immense hangar ressemblant à une vieille gare abritant des centaines de soldats en ordre de marche. Un vrai mégalo ce Qin ! En nous baladant autour du hangar, nous avons aussi pu admirer le travail de patience des archéologues occupés à rassembler les morceaux trouvés dans le sol et tenter de leur faire retrouver leur forme d’origine. Malgré la foule qui vient visiter cet endroit, nous avons vraiment beaucoup aimé !

Autre endroit très chouette à Xian, le quartier hui, pas loin des énormes tours du tambour et de la cloche. Il s’agit d’une ethnie chinoise musulmane qui descendrait des marchands, artisans et soldats arabes et perses qui parcouraient la Route de la Soie. Dans cette ville super moderne comme l’aiment les Chinois, ce quartier est un autre monde. Composé d’un marché vendant tout le brol habituel, petits livres rouges de Mao traduits, tshirts Oba-Mao, faux bijoux de jade et autres casquettes pandas, mais aussi de ruelles plus authentiques. Ici les odeurs de brochettes épicées occupées à griller se mêlent au parfum sucré des fruits séchés, les bruits de klaxon se mélangent à ceux des artisans qui frappent la pâte de nougat fraiche. Pour échapper encore plus à l’animation, nous avons visité la grande mosquée du quartier. Cet étrange mélange entre architecture chinoise et écriture arabe donne un endroit très apaisant et assez unique.

C’est aussi à Xian que nous avons fait connaissance avec la pollution des villes chinoises. En visitant la pagode de l’Oie sauvage, en l’honneur d’un moine routard qui a voyagé jusqu’en Inde il y a quelques siècles, nous avons eu l’occasion de voir (et de sentir) ces visions fantomatiques. L’horizon de la ville est voilé d’une brume opaque d’une couleur oscillant entre blanc et brun. La gorge et le nez qui piquent ne laissent aucun doute : ce n’est pas une simple brume de chaleur. Une vraie vision d’apocalypse…

Nous ne serions pas complets à propos de Xian si nous ne mentionnions pas les Jiaozi, les raviolis chinois… Ce sont définitivement les meilleurs que nous avons goutés ! La pâte est parfumée au bon goût du bouillon dans lequel ils ont cuit et la farce est délicieusement épicée ! Miam ! Autre découverte dans une petite ruelle, un mini bouiboui où le patron sert en version originale complète de super bonnes nouilles faites maison. Trop bon !

Malgré sa taille tentaculaire, nous avons vraiment bien aimé cette ville !

 

Un thé avec l’homme de Chengdu

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« Ma mère était enceinte quand elle a échappé à la torture… Je suis donc chanceux d’être là aujourd’hui ! »

Cette phrase restera longtemps gravée dans nos mémoires. Tout comme la longue conversation que nous avons eue avec cet homme de Chengdu.

Tout a commencé (comme souvent en Chine) avec une tasse de thé. Un après-midi, nous nous posons dans un parc de la ville et commandons un thé (au hasard!). Nous le dégustons quand un homme nous aborde en anglais et nous propose de nous joindre à lui. Nous acceptons avec plaisir et nous commençons à bavarder.

Il est ingénieur en chimie et vient de faire une pause dans sa carrière pour de grandes entreprises internationales. Il nous pose beaucoup de questions sur la Belgique et nous sur la Chine.

Il nous parle de sa fille qui voudrait étudier à l’étranger mais ne maitrise pas bien l’anglais. Nous parlons des enfants en général et nous lui demandons quelques détails sur la politique de l’enfant unique.

L’homme de Chengdu : Aujourd’hui, cette politique s’est assouplie. Vous pouvez avoir un second enfant si vous êtes tous les deux des enfants uniques. Mais en réalité les jeunes d’aujourd’hui n’ont plus vraiment envie d’en avoir. Cela coûte trop cher ! J’ai entendu que les gens en Europe ne se mariaient plus qu’officiellement et qu’ils ne faisaient plus de fête. C’est vrai ?

Nous : Autour de nous beaucoup se marient encore mais c’est vrai que certains créent leur propres cérémonies et ne vont plus à l’église. Mais le coût reste important dans les deux cas.

L’homme de Chengdu : Vous devriez l’organiser comme les Chinois. Ici, la coutume est de donner une enveloppe aux mariés avec des sous. Et cela peut aller de 1000 ¥ (145 €) pour un ami lointain à parfois 3-4000 ¥ (440-590 €) pour un proche. Dans de petites enveloppes rouges (la couleur de la chance). Les mariés ont toujours beaucoup plus d’argent après un mariage !

Il nous demande ensuite s’il est vrai qu’en Europe les gens préfèrent les vieilles maisons.

Nous : Oui en Europe, beaucoup de gens rêvent d’une vieille maison pleine de charme. Beaucoup sont en quête d’un peu d’authenticité.

L’homme de Chengdu : Mais pourquoi ? Ici, le rêve est d’avoir un logement le plus neuf possible. Comme ça, il est en bon état et moderne.

Nous parlons aussi beaucoup des systèmes d’éducation et de santé en Chine

L’homme de Chengdu : Avant, tout était gratuit, les soins à l’hôpital, les médicaments,… Mais récemment tout a changé, il n’y a plus que les soins à l’hôpital qui sont en partie gratuits. Tout le reste est devenu payant.

Nous : C’est dû à l’ouverture de l’économie ?

L’homme de Chengdu : Oui, c’est mal géré. L’éducation aussi coûte énormément aujourd’hui. Ça aussi, c’était gratuit avant. Comment cela se passe en Belgique ?

Nous : (Nous lui expliquons notre système)

L’homme de Chengdu : Donc c’est un système socialiste ?

Nous : Euh en tous cas, c’est un système très redistributif, oui.

L’homme de Chengdu : C’est dingue. En Chine, il ne reste plus grand chose du communisme !

Nous : A part dans le domaine politique ?

L’homme de Chengdu : (Il éclate de rire) Oui évidemment !

En voyant sa franchise, nous nous risquons à lui demander quelle est l’image de Mao aujourd’hui.

L’homme de Chengdu : C’est controversé. Beaucoup de gens l’adorent et pensent qu’il a fait de bonnes choses. Vous voyez ce que c’est la Révolution culturelle ?

Nous : (Nous lui montrons qu’il peut poursuivre son explication)

L’homme de Chengdu : Mao était un homme doué pour la politique et les luttes de pouvoir mais pas du tout pour l’économie. Mao avait de drôles d’idées comme le Grand Bond en avant. L’idée était que la Chine avec sa population et son potentiel pouvait rattraper n’importe quel pays dans n’importe quel secteur et Mao a donc décidé que le pays allait rattraper la production d’acier de l’Angleterre. Du coup tout le monde a commencé à faire de l’acier. Beaucoup de gens ont quitté leur activité pour aller travailler dans ces usines. C’est complètement idiot comme idée, non ? Cela a donné une période très difficile pour la Chine avec des famines (et des dizaines de millions de morts). La Chine a souffert de cette période pendant des années. Au sein du parti communiste, il y avait des gens doués en économie, dont Deng Xiaoping (Celui qui plus tard ouvrira la Chine à l’économie libérale). Ces gens ont lancé des réformes mais Mao les a dénoncé comme capitalistes et a lancé la révolution culturelle. C’était terrible. Des tas de procès et d’exécutions. On torturait dans les prisons. Beaucoup de gens ont été envoyés dans les campagnes. Mao s’est basé sur des jeunes qui ont commencé à porter un bandeau rouge au bras, signe de leur soutien à la révolution : ce sont les gardes rouges. Ces jeunes n’allaient plus à l’école et faisaient régner l’anarchie partout. Les enseignants étaient particulièrement visés. Ma mère travaillait dans une école au moment de la révolution culturelle. Elle était enceinte de moi. Souvent ils emprisonnaient les professeurs pour les torturer. Mais ma mère n’enseignait pas, elle effectuait des expériences dans un labo lié à l’école. C’est la seule raison pour laquelle elle a échappé aux gardes rouges…

Je suis très chanceux d’être là aujourd’hui en fait…

Nous : (Silence)

L’homme de Chengdu : Cette période a duré 10 ans. Ils ont détruit quasi toutes les antiquités de Chine. Il n’en reste plus que quelques-unes. En 1976, Mao est mort et la Révolution culturelle a cessé.

Absorbés par notre conversation, nous ne nous sommes pas rendus compte que le soir était déjà là. Nous discutons encore un peu avec notre nouvel ami puis nous nous séparons. Cette tasse de thé partagée avec cet homme de Chengdu, nous nous en souviendrons longtemps.

Une halte au Sichuan

Temple taoiste

Notre TGV file à du 200 km/h pour nous permettre de rejoindre la ville de Chengdu en… 15h. Oui oui, la Chine c’est vraiiiment grand !

Nous voilà donc arrivés en plein coeur de la Chine, à un millier de kilomètres de Hong Kong et de Canton. C’est une toute autre Chine qui s’impose à nous : un climat chaud mais moins humide, des visages plus souriants, une cuisine très épicée, des traditions bien ancrées…

Nous passerons pas mal de temps dans la ville de Chengdu. Cette dernière fut longtemps une cité incontournable dans l’Empire du Milieu, même si pour nous, elle ressemble surtout à toutes ces grandes mégapoles ultra urbanisées d’aujourd’hui. La ville est bien plus grande que ce que nous avions imaginé, certains quartiers sont à une belle petite trotte, heureusement qu’il y a un métro moderne dans le centre-ville.

Nous avons vraiment apprécié cette ville. Au détour d’une rue bruyante, un parc populaire où il fait bon s’asseoir sur un banc et regarder les familles profiter de leur journée. Après un carrefour bondé et anarchique, une petite rue aux maisons chinoises traditionnelles. En face d’une rue commerçante qui grouille de monde, un temple où se recueillent les fidèles…

Des parcs il y en plusieurs dans la ville et ce sont de véritables havres de paix. On peut s’y promener durant de longues minutes, sans en voir la fin. On y voit souvent une nature luxuriante, des fleurs aux milles senteurs et des plans d’eau paisibles. Des familles s’y promènent, dégustent des bâtons de caramel, tentent de garder un oeil sur leurs petits enfants « empereurs » (un peu pourris-gâtés les enfants uniques ici, il faut le dire). On peut observer des vieillards jouer à de multiples jeux, comme le « mahjong ». Mais ce que nous avons particulièrement aimé, c’est prendre le thé dans une maison de thé, à l’ombre de grands arbres. On pointe du doigt au hasard sur la carte des thés et on se ressert à volonté. C’est durant ce chouette moment que nous avons fait la connaissance d’un sympathique monsieur – parlant couramment l’anglais – avec qui nous avons échangé sur toutes les facettes de la Chine. Et sans tabou… Une belle rencontre qu’on est pas prêt d’oublier !

Chengdu comprend de nombreuses petites ruelles dites « à l’ancienne ». En effet, l’architecture fait penser à de vieilles maisons chinoises traditionnelles avec leurs lampions et petits toits courbés. Mais ce sont de vraies attractions pour touristes (chinois dans ce cas) et donc, on dirait presque un parc d’attraction, tout pousse à consommer : gadgets, nourriture, tee shirts, lumières et musique. Malgré tout, super intéressant à observer ! Et puis, ça change quand même des grattes-ciel !

Ah et les temples de Chengdu ! Nous y serions restés des heures entières ! Ces lieux sont toujours très calmes et l’ambiance particulière. Il faut bien faire la différence entre les temples bouddhistes, comme le temple Wenshu et Daci et les temples taoïstes, comme le temple des chèvres de bronze. Les premiers sont dédiés à Bouddha, tandis que le dernier à la philosophie et aux croyances taoïstes (on vous dit le ying et le yang, ça vous dit quelque chose?:-)). Ici, les fidèles font brûler des bâtons d’encens et se recueillent sous le regard bienveillant soit des moines bouddhistes, têtes rasées, soit des sages taoïstes, aux longues barbes et aux petits chignons au sommet du crâne.

C’est pour découvrir un lieu très important du taoïsme que nous nous sommes rendus hors de la ville, sur la montagne sacrée de Qingcheng Shan. Un lieu magique, des petites collines à perte de vue, partiellement voilées de nuages et parsemées de petites temples. Il faut marcher dans cette nature verte pour voir tous ces ensembles sacrés, et atteindre la grande pagode, tout au sommet de la montagne. La vue y est à couper de souffle ! Après il faut tout descendre, marche par marche, dans le calme de la nature mais dans le bruit des familles chinoises venues en visite :-). Une belle échappée de la ville !

Une autre pause dans notre visite du centre urbain qu’est Chengdu, mais aussi une des principales raisons qui nous a poussé à visiter le Sichuan : la rencontre avec le panda géant. C’est ici que vivent les derniers spécimens de cette espèce. Très peu nombreux et discrets dans la nature, il est impossible de les voir. Par contre, de nombreux projets sont mis en place pour protéger l’espèce en grand danger de disparition. Nous nous sommes donc rendus dans le centre de reproduction non loin de la ville pour les observer en vrai ! Une de nos plus belles matinées ici ! Nous sommes arrivés à l’ouverture du centre, vers 8h. Il fait encore frais. C’est un très bel endroit, très nature avec de grands espaces pour les animaux – presque des petites forêts (de bambou et autre!). Certains pandas faisaient encore la grasse matinée. Puis, petit à petit, on a pu les observer dans leurs grands espaces verts en train de grignoter leur bambou tant adoré (leur unique régime alimentaire – qui réduit fortement leur activité sexuelle et met en danger l’espèce toute entière – véridique !). Ces animaux sont magnifiques, ce sont de grands nounours au pelage noir et blanc. Au début de la matinée, nous avons eu quelques moments privilégiés, loin de la foule, pour observer un panda prendre un bain dans son petit étang comme un homme dans un jacuzzi. Aussi, un jeune panda se laisser rouler dans la pente douce. Nous avons également pu voir des bébés pandas, de la taille d’une grosse souris, dans des couveuses. Nous avons également vu des pandas roux. Bien plus petits et vivant dans les branches des arbres, ils ont des bouilles à croquer ! A partir de 10-11h, les cars chinois sont arrivés et les décibels ont augmenté dans tout le parc (si vous avez envie d’entendre ce que ça donne, c’est ici). Tous munis d’une casquette à oreilles de panda, ils s’exclament très fort devant les enclos et prennent tout en photos (inclus les faux pandas en plastique près des boutiques souvenirs). Vraiment une autre façon de faire du tourisme, c’est surprenant ! Nous nous sommes donc tout doucement orientés vers la sortie, en sautillant de joie d’avoir vu des pandas presque dans leur milieu naturel.

Savez-vous que tous les pandas sont loués aux zoos à travers le monde et ne peuvent être achetés par les entreprises ou pays ? Les deux pandas de PairiDaiza appartiennent donc toujours à la Chine !

Un autre moment fort de notre séjour sichuanais fut l’opéra ! Ce spectacle reprend quelques genres artistiques traditionnels de la Chine et surtout de la région du Sichuan : ombres chinoises, marionnettes, musique avec des instruments d’ici (guitare à une corde, trompette), danses avec des cracheurs de feu et des masques, pièces de théâtre… Nous avons adoré ! Alors, oui, on a pas tout compris surtout durant les pièces de théâtre, mais on retient surtout les couleurs, les costumes, le folklore, les rires de la salle et le fabuleux travail des artistes. C’était génial. Le tout accompagné d’un petit thé (que l’on a accepté), d’un massage (que l’on a gentiment décliné) et d’un nettoyage d’oreilles (que l’on a décliné sans hésiter!).

Bref, un beau paquet de chouettes expériences et découvertes dans cette région à part !

Lost in translation en Chine

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Voyager en Chine, c’est un choc. Bien sûr, voyager est toujours un peu un choc. C’est au minimum bousculer un peu ses habitudes. Il faut s’habituer aux moustiques, à la chaleur moite, à une autre langue, à des habitudes différentes,…

Mais avec la Chine, le choc est encore différent. De tous les pays dans lesquels nous avons voyagé, c’est le plus massif.

D’abord, ça peut paraitre simple, mais il faut s’habituer à un environnement où vous ne comprenez rien du tout. On reconnait évidemment des tas d’éléments : c’est le même genre de modernité qui progresse en Chine qu’en Occident. Mais tout ce qui est écrit vous échappe et ça change tout. L’anglais est utilisé dans les métros par exemple, mais c’est à peu près tout. En Chine, l’anglais est enseigné au minimum pendant 9 ans à l’école. Mais en fait personne ne le parle, probablement faute de pratique. Vous êtes livrés à vous mêmes et les gestes et la débrouille sont les seuls recours. Nous n’avons par exemple jamais eu autant de difficultés à nous orienter dans une ville ou à trouver notre chemin. Toute une aventure !

Ensuite, il faut s’habituer à des coutumes locales. Un gros raclement de gorge et un gros crachat atterrit à quelques mètres de vos pieds. Ou un rot sonore est émis à quelques centimètres de votre oreille dans le métro. C’est sûr, c’est une autre culture. Pour les Chinois par exemple, manger sans bruit ne permet pas de montrer sa satisfaction et donc il est nécessaire et bien vu de faire du bruit. Toujours concernant les repas, il est impoli de ne pas terminer son assiette car cela signifierait que vous n’avez pas eu assez. On est loin de « tu ne quittes pas la table tant que tu n’as pas fini ton assiette ! ».

Les balades sont aussi très instructives. Durant les premiers jours, nous avions toujours l’impression d’être dans le chemin de quelqu’un, de devoir s’arrêter à chaque pas. Et en les observant, nous nous sommes rendus compte qu’ils se comportaient assez bizarrement en rue (de notre point de vue évidemment!). En pleine foule, certains s’arrêtent net comme pour réfléchir ; une maman s’arrête avec son landau et son enfant à la sortie d’un escalator, bloquant ainsi le passage de tout le monde ; quelqu’un passe devant vous alors que cela fait 10min que vous faites la file ; ou encore une voiture qui tente de remonter à contresens une autoroute pour éviter de faire le tour… rien n’a l’air d’être fait avec une mauvaise intention mais cela interpelle ! Tout cela donne une anarchie assez impressionnante où chacun fait un peu ce qu’il veut. Les piétons marchent sur les grandes routes et traversent n’importe où, les motos roulent sur les trottoirs, les gens se ruent dans le métro et courent en se bousculant pour avoir une place assise. On dirait des millions de trajectoires individuelles qui s’entrechoquent pour ne pas perdre une minute. Vraiment intéressant à observer mais, il faut l’avouer, super fatiguant parfois.

Tout cela nous a amené à une réflexion plus large : nous avons l’impression que les Chinois vivent dans des bulles. Qu’ils vivent davantage les uns à côté des autres plutôt qu’ensemble. Cette impression s’accentue quand nous les observons avec leurs smartphones : c’est du non-stop. Ceux qui chez nous dénoncent les jeunes Européens accros à leur gadget n’en croiraient pas leurs yeux…

Ce qui frappe aussi en Chine, c’est l’impression d’être une star ou une bête de cirque, c’est selon la personne qu’on croise. Ils ne doivent pas voir beaucoup d’Occidentaux par chez eux… et encore, nous n’avons pas été dans les campagnes chinoises ! Les enfants tirent la main de leurs parents quand ils nous aperçoivent, comme nous le ferions si nous croisions Poelvoorde dans la rue. Certains nous demandent même une photo avec leur enfant… Dans beaucoup de cas, c’est fait avec le sourire et beaucoup de curiosité. Mais dans d’autres, aucune connexion ne se fait et nous sommes analysés de haut en bas sans un sourire. Il faut dire que nous n’avons croisé que très peu de routards occidentaux. En fait, quelques-uns dans les auberges de jeunesse mais presque personne sur les sites que nous avons visités. La Chine attire beaucoup plus les foules de touristes chinois et asiatiques !

Autre observation, par rapport à Hong Kong, où nous avions trouvé les gens carrément désagréables, les Chinois du « mainland », comme on appelle la Chine continentale, sont plutôt souriants. Il suffit souvent de décocher un sourire pour en recevoir un en retour.

Voilà pour ces quelques premières impressions. C’est sûr, cela fait presque 10 mois que nous sommes en route, et nous devons ressentir un peu la fatigue du voyage. Mais la Chine est clairement le pays le plus bousculant que nous avons visité. Ce qui le rend d’autant plus intéressant. Âmes sensibles s’abstenir donc, mais le jeu en vaut le bol de riz !